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texte d'exposition

Orkest!

Oliver Beer / Rubén D’hers / Nicolas Field / Julian Sartorius / Michael Schmid / Konrad Smoleński / Rutger Zuydervelt

07.12.2014 > 06.03.2015

La vieille maison de ville Van Borssele est le siège du Stedelijk Conservatorium (Conservatoire municipal) de Bruges depuis la fin du XIXe siècle. L’ancien salon fait maintenant office de salle d’attente où les étudiants se rassemblent en silence avant le début des cours. Cet espace très éclairé, avec ses pilastres rythmiques et sa vue sur le jardin, est un véritable entonnoir pour les stimuli auditifs. Les sons s’acheminent des quatre coins du bâtiment, emplissant le salon d’un mélange original d’éclats orchestraux. Le claquement des percussions, les bribes de chant, de piano et de flûte font trembler la pièce. Pour certains une cacophonie, pour d’autres une expérience auditive relaxante rappelant l’échauffement et l’accord des instruments avant le concert.

L’exposition Orkest! met en valeur l’interaction sonore entre différentes œuvres. Celles-ci se font écho, interagissent dans leurs rapports de voisinage, se complètent dans les espaces interstitiels. L’effet général résonne comme une symphonie prolongée, une composition sans fin s’efforçant de suspendre le temps, de le mettre à l’arrêt, de faire oublier qu’il a jamais existé. Orkest! a été conçu comme un ensemble sculptural qui prend en compte l’architecture du bâtiment de Netwerk et les itinéraires des visiteurs. En se déplaçant entre et parmi les différentes œuvres, ceux-ci percevront les contrastes et les dynamiques changeantes, créeront leurs partitions personnelles. Ils sont invités à s’asseoir sur les bancs et à écouter, exactement comme dans la salle d’attente du conservatoire.

Orkest! rassemble huit installations d’artistes internationaux pour une aventure sonore de trois mois. En entrant dans cette exposition qui ouvre les oreilles plutôt que les yeux, l’écoute est immédiatement stimulée.

Rez-de-chaussée
La sur-sollicitation de nos oreilles nous incite souvent à nous fermer à la profusion des sons rencontrés dans la vie quotidienne. C’est le cas avant un concert de musique classique, pendant le réglage de l’orchestre. Ce son — le vacarme du public combiné à celui du réglage des instruments – a pourtant pour effet de préparer l’oreille à l’écoute de ce qui va se produire.

Que se passerait-il si quelqu’un s’emparait de ce son passionnant et l’étirait en un ronronnement continu? Rutger Zuydervelt présente Stay Tuned, une installation sonore pour huit hautparleurs qui incorpore un large spectre d’instruments, de techniques et de styles.

Dans cette pièce, plus de 150 musiciens et chanteurs se règlent sur le ton du concert (le ‘la’). Le résultat? Un quasi-concert, dans lequel les contributions individuelles sont aussi importantes que le son collectif. Les visiteurs sont libres de se déplacer dans l’espace de l’installation, de traverser l’orchestre au moment où il s’accorde, chaque pas influençant la perception du son et du ton du ronronnement. Une expérience dans laquelle le temps semble s’arrêter.

Rutger Zuydervelt (°1978, Pays-Bas) est designer graphique, musicien et compositeur. Depuis 2004 il travaille sous le nom de Machinefabriek. Son style réconcilie musique d’ambiance, mu- sique classique moderne, drone, noise et field recording, qu’il combine pour créer des ‘films sans images’. En plus d’être un musicien prolifique, — avec près de cent disques à son actif — Zuydervelt est de plus en plus présent dans les champs de la danse, du film et de l’installation.

Galerie
Dans son travail, Konrad Smoleński (°1977, Pologne) utilise photographie, installation, vidéo, son et sculpture dans des performances collaboratives avec d’autres plasticiens et musiciens. Il vit et travaille à Varsovie et Berne. L’œuvre Smoleński est internationalement connu. Il a été ex- posé à la Manifesta 9 de Genk, au Palais de Tokyo à Paris, au Musée d’Art moderne de Vorsovie, à Performa 13 à New York et, plus récemment, au pavillon polonais de la 55e Biennale de Venise ou à Volkspaleis 2014 à La Haye, où Smoleński a créé une installation monumentale pour le Zuiderstrand Theatre.

Everything Was Forever, Until It Was No More est un instrument sculptural qui joue chaque jour un morceau de musique écrit pour deux cloches de bronze, deux murs d’enceintes et un objet résonnant. En l’occurrence, cet objet est une batterie sur laquelle Julian Sartorius a joué pen- dant le vernissage. La composition lie le son riche et symbolique des cloches au son abstrait des échos et des résonnances. Jouant des effets de retard, Smoleński crée un monde dans lequel l’histoire ralentit jusqu’à l’immobilité. Cette installation monumentale a été exposée à la Bien- nale de Venise en 2013. Le son des cloches a été complémenté, spécialement pour Orkest!, par le son du tambour et par les sept autres installations qui constituent l’exposition. Smoleński utilise les bruits changeants émis par l’ensemble comme source sonore pour sa symphonie étendue.

La performance sonore Everything Was Forever, Until It Was No More a lieu tous les jours à 15h.

Julian Sartorius (°1981, Suisse) est un percussionniste hors normes, qui a collaboré avec des gens tels que Nils Petter Molvaer, Rhys Chatham ou Sophie Hunger. Cette année, il a joué un solo captivant à Netwerk à l’occasion de Drums ‘n Friends Again, et y a aussi présenté sa premi- ère œuvre visuelle.

L’installation sonore et vidéo Schläft ein Lied in allen Dingen est une continuation de son projet Beat Diary. Pour celui-ci, il a créé un rythme par jour pendant un an, utilisant différentes surfaces et différents contextes : des ponts, des trains, des arbres, des ascenseurs, des balustrades, etc. Ces 365 compositions sont sorties sous la forme d’une Beat Diary Box, qui contient un vinyle et un livre de documentation photographique. L’installation de Sartorius se compose de six encein- tes et de trois écrans montrant trois boucles de différentes longueurs, triptyque dans lequel de nouvelles combinaisons d’images et de rythmes émergent constamment. Le titre fait référence au poème Wünschelrute de Joseph Freiherr von Eichendorff, poète et écrivain romantique alle- mand. ‘Schläft ein Lied in allen Dingen’ peut se traduire par ‘Une chanson dort dans toutes les choses’ ou, comme John Cage l’a dit dans les années cinquante : ‘Everything we do is music’.

Schläft ein Lied in allen Dingen
die da träumen fort und fort,
und die Welt hebt an zu singen,
triffst du nur das Zauberwort

Une chanson dort dans toutes les choses,
pendant qu’elles dorment,
sans être entendues,
mais le monde remue et chante
quand tu prononces le mot magique.

Pakhuis +1
Oliver Beer (°1985, Angleterre) est artiste et réalisateur. Il s’intéresse à la musique et aux arts visuels, à la relation entre le temps et l’espace et à la façon dont la voix peut influer sur l’architecture, et vice versa. Dans sa pratique artistique, ces intérêts se manifestent dans de fascinantes performances.

La vidéo Mum’s Continuous Note montre un moment d’intimité avec la mère de l’artiste. Elle donne le « la » pendant trois minutes sans reprendre son souffle, comme une ode à la beauté du son et à l’harmonie des émotions. Dans les sous-titres, le chanteur commente — non sans humour — son apparente virtuosité, sa technique de respiration circulaire, et le potentiel émotionnel des harmonies qu’elle crée à l’aide d’un ukulélé bleu.

Pakhuis +2
Rubén D’hers (°1980, Venezuela) est un musicien et artiste du son installé à Berlin. Son travail place la guitare au centre d’installations sonores, de performances et d’improvisations. Il a été montré, entre autres, à ZKM Karlsruhe, au Neues Museum de Weimar et au Weart Festival de Barcelone.

Chords Tunnel #1 est un tunnel sonore réalisé à partir de 40 guitares acoustiques, de 40 petits moteurs à courant continu, de 800m de câble haut-parleur, de tissu et d’un ordinateur. Les guitares, que D’hers a empruntées à des habitants du quartier, en constituent la base. D’hers les a réglées sur quatre modes différents. La vitesse des moteurs fluctue en vagues et, avec le son, guide le visiteur à l’intérieur du tunnel. Dans ce paysage sonique paisible, les différents tons qui se chevauchent glissent doucement d’un accord à un autre.

Michael Schmid (°1973, Allemagne) est un flûtiste et l’un des membres permanents de Ictus Ensemble. Il travaille aussi en freelance pour plusieurs chefs d’orchestres et ensembles, parmi lesquels Musikfabrik, Nieuw Ensemble et Radio Kamerorkest Hilversum.

beat fucked ELF est une installation qui comprend une flûte basse, des microphones, des haut- parleurs et un mixeur digital. Elle dévoile la musique recelée par une flûte basse au repos. Celle-ci pend au plafond et résonne de la façon la plus simple, « jouée » par les vibrations de l’espace réverbérant. Le son — capté par les microphones montés sur la flûte — chante dans tout l’espace grâce à des enceintes. Chaque microphone, placé sur un nœud harmonique, produit une tonalité unique. L’effet est amplifié par un dispositif d’enregistrement qui décuple les résonances dominantes de l’acoustique. Les micros jouent un rôle ambigu : ils sont à la fois sources sonores et observateurs. La partition est jouée via un mixeur digital qui contrôle les micros. Appuyer sur PLAY pour commencer.

Zaal
Nicolas Field (°1975, Angleterre) vite et travaille à Berne. Il a étudié les percussions à Amsterdam et à La Haye et est le co-fondateur de N-Collective, un groupe dédié au développement, au soutien et à la promotion des musiques nouvelles. En 2008 il a commencé à s’aventurer au-delà de son travail de musicien et de compositeur en créant des œuvres visuelles et des installations sonores.

Shimmering Beast est un triangle à l’envers (5 × 6 m) composé de quarante-cinq cymbales posées sur des pieds, animées par des transducteurs acoustiques et de la lumière. Cet étalage monumental et éblouissant produit un son chatoyant : le sol, qui vibre, provoque le frôlement des cymbales. Shimmering Beast a été créé pendant la résidence de l’artiste à l’institut suisse de Rome et a été montré pendant la représentation de Caligula par Needcompany.

Studio
Michael Schmid & Nicolas Field ont été invités en résidence à Netwerk en 2014. Ils présentent l’œuvre créée par eux à cette occasion.

Missa Cuiusvis Toni est un chef-d’œuvre de la polyphonie flamande du XVe siècle, du compositeur Johannes Ockeghem. La pièce est remarquable par son absence de clé ; elle peut être chantée dans les quatre tons ecclésiastiques (cuiusvis toni): Protus ou mode de ré ; deuterus ou mode de mi; tritus ou mode de fa ; tetrardus ou mode de sol. Quel que soit le mode, c’est un morceau de musique cohérent qui est produit. L’_Ensemble Musica Nova_, conduit par Lucien Kandel, a enregistré cette œuvre en 2011. L’installation sonore All Tones de Michael Schmid et Nicolas Field joue les quatre modes — traités et mixés pour douze enceintes — simultanément dans le même espace. Le résultat est une merveilleuse œuvre contemporaine de musique atonale qui expose les dimensions cachées entre les différentes tonalités. Polyphonie flamande 2.0.

événement d’ouverture
Pour l’exposition Orkest!, tout le bâtiment de Netwerk se verra transformé en instrument. La partition de la nuit d’ouverture s’étendra même au-delà, dans la ville entière. L’exposition sera officiellement inaugurée depuis le toit de Netwerk, avec un morceau pour 23 cornes de brume par Heleen Van Haegenborgh et une installation de Konrad Smoleński accompagnée par un solo de batterie en live de Julian Sartorius, qui sera ensuite incorporé à l’installation.

Heleen Van Haegenborgh Signaux sur cornes de brume
La pianiste et compositrice Heleen Van Haegenborgh a choisi des cornes de brume pour accompagner les morceaux de piano de son premier CD Signaux. Elle a découvert Raoul de La Roch Aymon, un Français collectionnant les sirènes de bateaux, sur YouTube. Dans sa collection de plus de 300 cornes, elle en a sélectionné 23 qui, combinés, couvrent une amplitude de deux octaves. Elle a ensuite demandé à cet homme de construire un piano pour les faire jouer. L’orgue de cornes qui en résulte, dépourvu de régulateur de son, peut être entendu à des kilomètres. Chaque fois qu’une touche est pressée, de l’air comprimé est injecté dans la corne correspondante. Le mécanisme est binaire : chaque corne peut soit souffler, soit rester silencieuse, sans intermédiaire possible. Les cornes adoptent leurs tonalités caractéristiques en voyageant à l’air libre, en l’occurrence celui de la ville d’Alost.

Julian Sartorius solo de batterie
L’installation Everything Was Forever, Until It Was No More de Konrad Smoleński (Pavillon polonais Biennale de Venise 2013) utilise les sons de toutes les œuvres de l’exposition Orkest! pour les incorporer dans une seule performance orchestrale. Le soir de l’ouverture, le percussionniste Julian Sartorius accompagnera l’œuvre de Smoleński d’un solo de batterie, qui sera enregistré puis ajouté aux autres sons de l’installation. La batterie elle-même intégrera l’œuvre — en plus des cloches et des haut-parleurs — ajoutant un objet de résonance supplémentaire à la performance qui se déroulera quotidiennement.